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Quand l’intérêt général fait défaut

Par un arrêt rendu le 27 mai 2025, la Cour administrative d’Appel de NANCY précise que des travaux de réhabilitation et d’extension réalisés sous la maîtrise d’ouvrage d’une personne publique et financés par cette dernière ne sont pas nécessairement des travaux publics relevant des juridictions administratives. (CAA de NANCY, 4ème chambre, 27/05/2025, 24NC02966)

En l’espèce, la Communauté de Communes Territoire de Lunéville à Baccarat a conclu un bail à construction avec la Société Transalliance aux termes duquel elle s’est engagée à financer la réhabilitation et l’extension d’un ancien séminaire située sur le territoire de la Commune de Flin.

Le bail à construction prévoyait qu’il formait un ensemble indissociable avec la convention d’occupation temporaire conclue par la Communauté de Commune avec la Société Passeport Prévention portant sur les biens immobiliers susmentionnés.

Cette convention d’occupation temporaire, d’une durée identique à celle du bail à construction, fixait un loyer annuel calculé sur le coût prévisionnel des travaux à réaliser dans le cadre du bail à construction.

Le coût des travaux étant sensiblement supérieur au coût estimé, la Communauté de Commune a émis, le 16 mai 2024, un titre de recette correspondant à la différence, sur la durée de la location, entre le cumul des loyers et le coût définitif des travaux, déduction faite des subventions dont elle avait bénéficiées.

Dans ce contexte, sa cocontractante, la Société Passeport Prévention, a saisi la vice-présidente du Tribunal Administratif d’une opposition au titre exécutoire, laquelle a été rejetée au motif que cette demande était portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaitre.

Aux termes de l’arrêt commenté, la Cour Administrative d’Appel confirme la décision de la vice-présidente du Tribunal Administratif et rejette le recours de la Société Passeport Prévention rappelant qu’ont le caractère de travaux publics les travaux immobiliers répondant à une fin d’intérêt général et qui comportent l’intervention d’une personne publique, soit en tant que collectivité réalisant les travaux, soit comme bénéficiaire de ces derniers.

Or, elle a considéré que la Communauté de Commune avait accepté, à la demande de la Société Transalliance, de faire réaliser et financer, dans le cadre d’un bail à construction, des travaux de réhabilitation et d’extension d’un immeuble acquis par la Société Transalliance en vue d’une sous-location à la Société Passeport Prévention, avec la perspective de récupérer l’intégralité de leur coût par les loyers versés en contrepartie du contrat de sous-location, et dont le bailleur s’est porté garant.

En outre, la Cour a également relevé qu’il résultait des stipulations contractuelles du bail à construction que la Communauté de Commune ne pouvait modifier les caractéristiques du projet telles qu’exposées dans ledit bail sans l’accord préalable du bailleur.

Enfin, la Cour administrative d’appel a considéré que les constructions avaient dès l’origine vocation à être exploitées par la Société Passeport Prévention, sans aucune intervention de la Communauté de Communes, et à devenir, aux termes du bail à construction, la propriété de la Société Transalliance.

Dans ce contexte, elle en a déduit que, si ces travaux répondaient à l’objet statutaire de la Communauté de Commune, et qu’ils n’étaient donc pas totalement dépourvus

d’une finalité d’intérêt général, ils devaient être regardés, en l’espèce, comme ayant été réalisés dans le seul intérêt et pour le compte des Sociétés Transalliance et Passeport Prévention quand bien même la Communauté de Commune les a financés et jouissait d’un droit réel sur les constructions en résultant.

En toutes hypothèses, les juges du fond ont constaté que ces travaux n’avaient pas été réalisés par la Communauté de Communes dans le cadre d’une mission de service public qui lui aurait été dévolue par ses statuts.

 

Marie-Pierre Alix, Célia Tessier